Cette fois, c’est décidé… Je ne rentrerai pas bredouille…
Deux mois que je suis seule… Deux mois sans toucher du bout des doigts la douceur d’une
autre peau.
Je mets le paquet… Je sors ce soir et je vais jusqu’au bout.
Mon reflet dans le miroir me plait assez.
J’ai bien fait d’acheter cette robe pour finir.
Lorsqu’elle est arrivée par la poste, le premier essayage m’a consterné. J’étais certaine de
ne jamais pouvoir la porter.
Mais ce soir, je la trouve parfaite.
Je suis assez grande pour que ce long fourreau noir mette en valeur mes formes
longilignes.
Les fines bretelles encadrent parfaitement les muscles tendus de mes
omoplates.
Quand au large laçage, qui laisse ma peau offerte sur tout le côté gauche, il est si bien
étudié, que la ficelle noire de mon string ne s’aperçoit même pas.
La longue fente de l’autre côté me permet de marcher, et laisse apparaître ma jambe à chaque
mouvement.
Oui, décidemment, je m’aime plutôt bien ce soir…
Pour ce qui est des chaussures… il ne faut pas rêver non plus… je ne vais pas d’un seul coup
me déguiser.
Gothique je suis, gothique je reste…
Mes bottines lacées sont les plus féminines que je possède… ça ira très bien…
Je ne vais quand même pas mettre des escarpins et à talons en
plus !
Rien que d’y penser, je souris toute seule…
Zut… je n’ai presque plus de gel !
Pour ce soir ça ira.
Je travaille rapidement les piques de ma nuque coupée très courte.
Les longues mèches qui cachent les côtés rasés de mon crâne se placent juste bien pour
encadrer mes yeux charbonnés à souhait.
Un peu de rouge à lèvre pourpre très foncé et ma peau laiteuse est mise en
valeur.
Dernier contrôle dans le miroir… parfait… je me trouve tout à fait désirable pour une
fois…
En avant pour cette boite chique, où Martine m’avait emmenée il y a bien longtemps
maintenant…
J’arrive tard et les danseurs commencent déjà à s’essouffler.
En m’installant au bar, je commande un Whisky coca.
Cette boisson a la particularité de m’émoustiller sans me faire perdre mes moyens. Avec le
coca, les bulles sucrées font monter plus vite les effets de l’alcool et remplissant le verre, elles prolongent le plaisir…
Je laisse mes yeux partir en chasse.
J’observe autour de moi en sirotant mon verre dans une pose étudiée. Sur la réserve tant que
je n’ai pas trouvé l’objet de ma convoitise, mais prête à émettre les signaux les plus clairs si je croise un regard qui m’attire.
C’est dans cet état d’esprit, que soudain je la voie.
Mes résolutions, mes plans échafaudés minutieusement et mes idées claires volent en
éclat.
Je reste là, médusée, hypnotisée, comme paralysée par la vision de cette fille qui danse
seule au monde.
Sa longue crinière légère ondule au gré de ses mouvements.
Sa robe, incroyable, de mousseline diaphane en lambeaux étudiés, laisse par intermittence,
apercevoir son corps sans jamais le dévoiler totalement.
D’ici, sa taille fine semble prolongée de longues jambes dont les pieds minuscules semblent
voler sur la piste dans ses petits chaussons de fée.
Des fleurs de cuir sur ses chevilles laissent entrevoir sa peau nacrée.
Ses bras ronds, paraissent habités d’une volonté propre, virevoltants lentement autour de
son corps, tantôt caressant, tantôt s’éloignant.
Enfin, son buste généreux sans être exposé, laisse deviner des formes tendres et
tendues…
La regarder danser me fait oublier où je suis et je me surprends à rêver.
Aussi, lorsqu’au premier slow, elle s’attache, lascive, au cou d’un homme, un pincement
violent de mon cœur me fait fermer les yeux.
Puis, je me laisse aller à m’imaginer à la place de ce mâle.
Je l’enlace, la caresse comme il le fait et l’embrasse amoureusement… comme
lui…
Je réalise enfin que c’est un vrai couple.
Je voudrais détacher mon regard de cette fille, me mettre en chasse d’une proie libre et
plus sure…
Mais je n’y arrive pas. Mes yeux insatiables, reviennent toujours sur elle et se remplissent
d’images sensuelles.
Tournant la tête pour boire une longue lampée de mon verre, je m’obstine à regarder le
barman, afin de reposer mon esprit en surchauffe.
Lorsque je me retourne, cherchant fébrilement l’objet de mon désir, je mets un certain temps
à réaliser qu’elle avance droit sur moi, suivie de près par son homme.
C’est lui qui m’adresse la parole, tandis qu’elle me sourit joliment.
Je me sens ridicule. Les mots ont du mal à sortir de ma bouche et il semble que je les lui
jette à la figure.
Et puis, je ne peux m’empêcher de la regarder de nouveau.
De près, elle est plus petite que je ne l’avais cru.
Elle s’est glissée entre lui et moi. Je pourrais la toucher sans même tendre le
bras.
Et le désir déferle de nouveau.
Qu’est ce qui peut bien me la rendre si désirable ?
J’aurais pu tomber sur n’importe quelle fille seule… Il fallait que ça m’arrive… Que je
flashe sur une fille casée et avec un mec en plus…
Elle me parle, mais je n’entends rien… voir ses lèvres remuer, me donne seulement envie de
l’embrasser.
C’est lui qui prend alors l’initiative.
Ça vous dit ?
Elle attrape son verre et avance en chaloupant gracieusement devant moi qui sans réfléchir
la suit.
Je m’arrête soufflée par ces quelques mots.
Quel est ce délire ? Ils veulent quoi ces deux la ?
Ce sont peut-être des pervers !
Lentement, je me retourne et la regarde.
Elle a trouvé une table ronde entourée d’une banquette dans un coin tranquille et
désert.
Elle penche gracieusement la tête comme pour une interrogation muette.
Elle est si jolie… son sourire m’émeut. Peu m’importe si je peux profiter de sa présence, de
sa fragilité, de sa douceur et plus… pourquoi pas…
D’un geste très courtois, il m’invite à avancer jusqu’à sa femme.
Et vous ?
Je voulais vous dire. Votre robe me fascine. Je la trouve très… … … … belle. Finit elle dans
un souffle en devenant toute rouge.
Elle est si désarmante. Sa soudaine rougeur me donne des envies de protection autant que de
punition… la voir rougir encore et encore…
Victor nous observe d’un œil amusé. Il a très bien saisi les sensations qui m’animent
ressentant à coup sur les mêmes.
Je vérifie mon effet, regardant Alice droit dans les yeux en prononçant ces mots. Et comme
je m’y attendais, elle redevient instantanément cramoisie.
Cela me fait sourire et me détend.
Après quelques échanges de banalités, le silence s’établit entre nous.
L’alcool et la musique aidant, nous nous répandons un peu plus sur la
banquette.
Alice, assise entre Victor et moi laisse apparaître ses jambes sans fausse
pudeur.
Elle se prélasse sur l’épaule de son homme comme une chatte au soleil.
Bientôt, je sens sa jambe contre la mienne avec comme seule barrière les lacets de ma
robe.
Sa peau est fraîche et douce.
Ma main posée sur ma cuisse n’est qu’à quelques centimètres de la sienne.
Je sens soudain le regard de Victor qui m’observe par-dessus la tête de sa
femme.
Il me sourit gentiment.
Est-ce une invitation à laisser libre cours à mon envie ?
Je tente ce pari et tout en le regardant je déplace lentement ma main vers la cuisse nue
d’Alice.
Son sourire s’élargit confirmant son consentement.
Lorsque mes doigts frôlent sa peau, un imperceptible mouvement de recul
m’arrête.
Je la regarde alors, droit dans les yeux, sans sourciller… Elle ne sourit plus, attentive,
comme dans l’attente de ce qui va suivre.
Je pose franchement ma main entière sur sa jambe. Pas de mouvement de repli cette
fois.
Victor se décale un peu, comme pour mieux observer ce qui se passe.
Il se retrouve aussi beaucoup mieux placé pour embrasser sa femme.
Et quand celle-ci tourne son visage interrogateur vers lui, ce sont ses lèvres qui lui
répondent par un long baiser.
Je sens monter une nouvelle vague de désir. Je donnerais cher pour être à sa
place.
Je profite tout de même de la situation, caressant lentement cette cuisse douce et
offerte.
Lorsqu’ils reprennent haleine, Alice a les yeux perdus dans le vague.
Victor, lui me sourit de nouveau et murmure quelque chose à l’oreille de sa
compagne…
Elle étouffe un mouvement de surprise, me regarde en rougissant de nouveau et m’adresse un
sourire timide.
Je ne peux m’empêcher de la malmener… Je veux qu’elle me désire. Qu’elle me demande.
Je ne veux pas qu’elle fasse semblant pour faire plaisir à son mâle…
J’attrape son menton et plonge mes yeux dans les siens.
Je continue à caresser sa cuisse et elle ne se dérobe pas. Au contraire, je la sens se
tendre vers ma main.
J’approche lentement mes lèvres des siennes. Mon désir est immense. Je sens mon string se
tremper.
J’attends, à quelques centimètres de sa bouche.
Elle ferme doucement les yeux et je sens son souffle devenir brûlant.
Lorsqu’elle pose ses lèvres sur les miennes, je suis submergée par une furieuse
envie.
Je pénètre sa bouche et mêle ma langue à la sienne.
C’est doux, parfumé et sucré. C’est à laisser son cœur gouverner tous ses sens. Je pers la
notion du temps, de l’espace et même celle de mon corps.
Ses lèvres sont douces et pleines, sa langue agile et téméraire. Elle a le goût d’un fruit
au parfum léger.
Lorsque cesse notre langoureux baiser, je suis en extase… mon cœur explose de ce désir
intense.
Elle n’a toujours pas ouvert les yeux. Son visage serein, reflète une douce
félicité.
Victor la regarde amoureusement.
Je veux bien la partager, mais pas la prêter.
J’ai envie d’elle autant que toi. Finit-il par me dire avec un sourire franc et sans
équivoque.
Nous quittions la boite rapidement et je les suivais avec ma voiture.
Je vous laisse imaginer la suite…
Pour ma part, j’ai inventé ces sensations, ne les connaissant pas.
Je n’ai jamais fait l’amour avec une femme et cela ne fait pas parti de mes
fantasmes…
Je sais en revanche que c’est un de ceux de L. et que peut-être un jour
…
Cela ne me rebute pas, mais ne m’attire pas non plus.
Alors si je vis cela un jour… je raconterai d’autres histoires…
En attendant, j’aimerais savoir si celles qui connaissent ces plaisirs se retrouvent
dans mon récit… est-ce plausible ? Ai-je su décrire des sensations justes ?
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