Lyzis et son L

Début : Initiation 1

Le vendredi suivant, c’est accoutrée comme à son habitude qu’elle fit son entrée. Après s’être changée derrière le paravent, elle vint s’assoir face à lui. Elle avait les joues rouges et le sourire aux lèvres.

- Travaillons d’abord si vous le voulez bien ! Que vous ayez à me supporter avant de me faire quelques promesses que ce soit. Vous allez commencer par retirer ces chaussures qui décidemment vous donne une démarche épouvantable et vous assoir là-bas, dans le carré de lumière rayé par les stores. Oui, oui ! Par terre. Attendez !

Il replia une de ses jambes nue, fit tomber l’emmanchure de la robe dévoilant son épaule et l’arrondi de son sein, arrangea quelques mèches de cheveux et pris du recul.

- Parfait ! Ne bougez plus.

Il la dessinait, prenant un autre feuillet quand il changeait d’angle. Elle se laissait rêver, se calmait, laissait le silence l’envahir et chasser la tension qu’elle éprouvait depuis une semaine. Elle se sentait bien, confiante, oublieuse de tout ce qui n’était pas ces instants suspendus. Peu à peu la sérénité la gagnait et elle ne pensait plus qu’à son corps qui s’engourdissait dans la pose, qu’à son genou trop plié qui s’éveillait presque douloureusement à elle, qu’à la morsure cuisante du soleil à travers les vitres…

- Vous voulez rester ainsi encore longtemps ?

Elle n’avait pas remarqué qu’il avait terminé, qu’il avait préparé le thé et l’attendait assis derrière sa table.

Se relevant en grimaçant, elle vint s’assoir, marchant sur la pointe des pieds.

- Vous êtes endolorie par la position… dit-il en lui adressant un clin d’œil souriant.

- Oui. Fit-elle dans un petit rire.

- Bien, reprenons notre conversation. Avez-vous bien réfléchi ?

- Je crois. En tout cas, j’y ai beaucoup pensé.

- Avant de me donner vos conclusions, je voudrais que vous me disiez précisément ce que vous avez compris.

- Et bien, vous avez très justement remarqué que j’étais une femme… disons sans grande expérience de la vie. Je ne sais pas m’habiller. Un sourire taquin se dessina sur ses lèvres. Je ne sais pas marcher avec des talons. Cette fois, c’est son petit rire qui résonna. Je suis introvertie et en marge de la société. Et vous me proposez votre aide. N’est-ce pas ?

Elle avait besoin de son approbation, de savoir qu’elle ne faisait pas fausse route, qu’elle ne le décevait pas. Mais il attendait autre chose d’elle, il la laissa paniquer devant son mutisme, juste assez pour qu’elle perde son sourire de gamine sure d’elle. Il ne voulait pas de superficiel, il voulait de la gravité, du sérieux, de la conviction.

- Poursuivez Capucine.

Elle réfléchit un moment avant de reprendre.

- J’ai besoin de vous. Je sais que je n’arriverai pas à m’en sortir toute seule. Je risque même d’abandonner le combat. Je sais que je survis, que je nage entre deux eaux mais que le fond est plus près que la surface. Je sais aussi que ce ne sera pas facile, que vous me ferez sans doute pleurer, que vous serez juste mais intransigeant et que vous saurez trouver les solutions pour que je grandisse enfin et pour que je m’en sorte la tête haute. Voilà ce que j’ai compris.

Il lui adressa un grand sourire, la libérant instantanément de l’angoisse qui l’étreignait. Elle était surprise du pouvoir qu’il avait sur elle. Lui l’avait remarqué et cela le ravissait.

- Excellent Capucine ! Vous êtes intelligente et comprenez vite et bien. Vous m’impressionnez. Et je vous remercie. Vous me donnez à penser que ce challenge est jouable et promet même d’être une réussite. Maintenant, il faut que nous soyons bien d’accord. Pour que je puisse vous mener à l’indépendance, à la fierté, à vous assumer totalement, il me faut votre confiance aveugle. Vous devez vous engager. En plus de ne jamais mentir et de toujours répondre à mes questions, vous devrez m’obéir. J’insiste sur ce point car c’est le plus délicat, le plus difficile à accepter aussi. Quelles que soient les circonstances, vous devrez toujours faire ce que je vous demande, vous y contraindre de toutes vos forces. Vous sentez vous capable d’accepter cela ?

Elle ne répondit pas tout de suite. Elle réfléchissait intensément… elle pesait le pour et le contre. Elle ne voulait pas reproduire les erreurs du passé mais elle était si seule, si perdue… Elle avait envie de lui faire confiance, de savoir que quelqu’un dans ce monde serait là pour elle. Il l’effrayait mais en même temps il la rassurait. Et puis, qu’avait-elle à perdre ?

Mais était-ce une raison suffisante pour prendre un tel engagement ? Et si finalement il voulait juste l’utiliser !?

En même temps, elle en avait déjà débattu avec elle-même durant la semaine. Et elle était arrivée à la conclusion que rien ne laissait soupçonner qu’il lui voulait le moindre mal. Qu’elle avait besoin de donner sa confiance et qu’elle désirait viscéralement que ce soit lui. Il semblait lire en elle comme dans un livre ouvert et si c’était dérangeant, c’était aussi rassurant de sentir que quelqu’un vous comprenait…

- Oui, je crois que j’en suis capable.

- Merci Capucine. Moi de mon côté, je dois aussi m’engager. Je vous promets de toujours vous respecter en tant que personne, que femme… de toujours agir pour votre bien… de ne vous poussez dans vos extrémités que pour vous aider à grandir… et surtout de ne jamais rien exiger de vous qui soit pour mon unique plaisir, pour moi…

Capucine, si vous vous engagez maintenant à me confier votre corps et votre âme… je m’engage réciproquement à ne rien faire d’autre que vous amenez à devenir une femme accomplie.

Elle le scrutait avec une étrange intensité, pénétrée par la solennité du moment. Elle allait à cet instant, lier sa vie à celle de cet homme qu’elle ne connaissait que depuis quelques semaines. Cet homme dont elle savait finalement si peu de choses mais qui avait sur elle un ascendant étrange.

Fermant d’abord les yeux, elle les ouvrit pour le fixer en prononçant clairement : - Je m’y engage Monsieur, de mon plein gré et après y avoir murement réfléchi.

- Je m’engage donc auprès de vous Capucine à toujours agir dans votre intérêt.

Levant sa tasse, il l’enjoignit à l’imiter pour trinquer dans un sourire.

 

- Et bien je vais commencer tout de suite. Vous allez rapporter ces chaussures bien trop hautes pour vous au magasin. Vous en choisirez une autre paire avec des talons qui vous permettent de marcher. Mais de vrais talons quand même ! Et à compter de la semaine prochaine, vous aurez interdiction de porter vos vieilles hardes et vos chaussures de garçon le vendredi. Si vous transgressez cet interdit, je me verrai dans l’obligation de vous infliger une punition. Vous recevrez donc une fessée déculottée que je vous administrerai moi-même et dont je déciderai la durée et l’intensité.

Avez-vous bien compris Capucine.

- Oui Monsieur !

Le rouge lui montait jusqu’aux oreilles et cela la lui rendait délicieuse.

- Au revoir Capucine, à vendredi.

Elle se changea, partit en fermant la porte avec discrétion, sans qu’il ne lui adresse un regard.

Dim 2 déc 2012 1 commentaire
Ahhh... Ce fameux "Monsieur" murmuré les yeux baissés...
Eronaute - le 08/12/2012 à 01h01

N'est-ce pas ! ;-)

Lyzis